LE GRAND ÉCART
LES PRIX BAS ET MOYENS
L'immense majorité des villes de 60 000 à 100 0000 habitants est en délégation de service public (DSP), la régie y est peu fréquente. Parmi les villes les mieux classées, il y a Antibes et son contrat hors normes (voir encadré). Mais aussi Cannes, où le syndicat intercommunal en charge de l'eau, le Sicasil, se tire très bien de ses révisions de contrat. La dernière a eu lieu en 2011 : - 23% sur l'eau potable, après - 18% en 2005, et un prix de l'eau dont l'augmentation ne peut être supérieure à celle du coût de la vie. En contrepartie, la Lyonnaise des eaux garde le contrat jusqu'en 2023. Avignon facture le m3 à un tarif maîtrisé, mais il y a un point noir. Son réseau a un taux de fuites élevé, même si les chiffres diffèrent entre ceux de Veolia et ceux des partisans d'un passage en régie.
Valence met fin à ses 40 ans de contrat avec Veolia sur l'eau potable et passe en régie publique le 1er janvier prochain. Objectif : « Stabiliser le prix en euros courants et mettre en place une tarification solidaire. » Vénissieux et Villeurbanne (tableau) font partie de Grand Lyon, qui a opté pour un prix unique de l'eau.
ANTIBES : Le contrat du siècle
Époustouflant. Même Que Choisir n'aurait jamais cru possible une telle diminution du prix de l'eau! 3,47 € le m3 TTC en 2012...
1,50 € en 2013 : Antibes-Juan-les-Pins bat tous les records. « Les négociations ont été homériques, se souvient Patrick Duverger, directeur logistique et responsable eau de la ville. Antibes était en contrat avec Veolia depuis 132 ans, on a tout remis à plat. On a fait un audit complet des réseaux, lancé un appel d'offres et, en parallèle, on a étudié le montage d'une régie. La Lyonnaise et Veolia ont concouru face à notre projet. On savait qu'on pouvait baisser le prix de l'eau de 37% en régie optimisée, la concurrence a joué à plein. » Évidemment, une pareille diminution chahute le marché et remet en question autant les entreprises que les communes, qu'elles soient en régie ou en délégation de service public. Le terme de contrat « Iow-cost » revient souvent. « Faux, rétorque Patrick Duverger. Les investissements augmentent. On est à 80% de rendement, on sera à 92 % en fin de contrat. L'indice linéaire de perte va diminuer et le taux de renouvellement des réseaux est porté à 1,12. C'est la marge du délégataire qui chute, elle était colossale, elle tombe à 2,86%. En cas d'aléa, il est clair que l'exercice peut être déficitaire pour Veolia. J'ajoute que ce prix de 1,50 € vaut pour une consommation de 120 m3, au-delà il augmente, on passe à 2,23 € pour 300 m3, 2,40 € pour 500 m3. »
LES PRIX TRÈS ÉLEVÉS
Pas de surprise du côté de Roubaix, Tourcoing et Villeneuve-d'Ascq, ces trois villes font partie de la communauté urbaine de Lille. Béziers est en contrat avec la Lyonnaise des eaux jusqu'à fin 2016, La Seyne-sur-Mer jusqu'en 2017 avec la Lyonnaise des eaux et fin 2016 avec Veolia. Les usagers n'ont pas grand-chose à espérer d'ici là. Bourges et Saint-Nazaire sont en régie. Leurs tarifs très élevés, respectivement 4,19 € et 4,26 €, sont la preuve que la régie publique n'est pas toujours compétitive face au privé. Dunkerque a adopté une tarification progressive dite éco solidaire, avec trois tranches de prix et un tarif social. La facture de 60 m3 a sensiblement baissé, celle de 90 m3 un peu, mais celle de 120 m3 a augmenté. Une incitation à consommer moins, à condition de ne pas avoir une grande famille !
DEUX GRANDS SYNDICATS DES EAUX
Parmi les villes qui comptent de 60000 à 100000 habitants, plusieurs se situent en région parisienne. Deux grands syndicats des eaux y dominent le marché, avec à chaque fois des tarifs conséquents. D'un côté, le Sedif, le puissant syndicat des eaux d'Î1e-de-France qui regroupe à ce jour 149 communes et dessert plus de 4 millions d'usagers. De l'autre, le syndicat des eaux de la presqu'île de Gennevilliers, qui regroupe 10 communes, surtout dans l'Ouest parisien. Dans nos deux tableaux, toutes les communes qui facturent l'eau potable (colonne « part eau potable ») 1,56 €, sont adhérentes du Sedif. Et les villes franciliennes qui la facturent 1,82 € adhèrent au syndicat des eaux de la presqu'île de Gennevilliers. Dans les deux cas, les prix sont élevés. Que Choisir avait dénoncé leurs marges énormes en 2007. Le Sedif avait vigoureusement contesté mais, en 2010, il a renégocié le contrat qui le liait à Veolia et obtenu une baisse de 20% sur l'eau potable. C’est un net progrès mais l'addition reste lourde pour les 4 millions d'habitants desservis. Ce nouveau contrat de DSP datant de 2011, les usagers n'ont rien à espérer pour les années qui viennent. Mais c'est pire avec le syndicat des eaux de la presqu'île de Gennevilliers. Le prix de l'eau potable n'a pas été renégocié à la baisse, il continue de s'envoler. 1,82 € actuellement, c'est un magnifique contrat pour la Lyonnaise des eaux, beaucoup moins pour les habitants des dix communes adhérentes. L'autre gros problème de ces communes est le prix de l'assainissement, qui précisons-le, n'est pas de la responsabilité de ces deux syndicats. Leurs eaux usées sont traitées par le Siaap, l'énorme syndicat interdépartemental de l'assainissement de l'agglomération parisienne, qui récupère les eaux usées de 4 départements et de 9 millions de personnes, mais il n'est pas le seul intervenant. Avant de traiter, il faut collecter. À Antony, par exemple, la facture rémunère le Siaap + le département + la commune + deux délégataires. À Courbevoie, le Siaap + le département + la commune + un délégataire. C’est pareil dans de nombreuses villes qui facturent l'assainissement très cher. La multiplication des intervenants ne facilite pas la maîtrise des coûts